Louis FUMEY

 En attendant un petit résumé de la courte vie de mon grand père Louis FUMEY, je vous renvoie aux " Cahiers de Losne, Chaugey, Maison Dieu" réalisés par Alain Cessot. Le n° 20 lui est consacré sous le titre  : Journal d'un soldat de la Grande Guerre Louis FUMEY de Chaugey ( 1886 - 1914).

Vous trouverez ci-dessous les lettres de Louis à sa femme au début de la guerre, après leur séparation. Ce sont ces lettres qui ont entrainé la réalisation du cahier cité plus haut.

Cahiers de losne

Lettres de mon grand père Louis Fumey à sa femme entre le 20 Juillet et le 26 juillet 1914

 

 

 

Senones le 20 juillet 1914

Chère petite (!!) femme

Aujourd’hui après quatre journées assez dures nous voici à Senones où nous restons encore demain toute la journée.Peut être pourrai-je aller jusqu’à Raon, mais c’est très problématique ; il ne faut même pas y compter. Enfin plus que trois jours et demi Ce n’est pas bien long mais enfin le temps me tarde de vous voir toi et notre petit Riri. Et puis l’autre que devient-il ? tàpe –t-il fort à la porte ? Ici je suis très bien logé. Un lit excellent, de  jolis  meubles, c’est très bien. Je suis l’hôte d’une veuve de 55 ans environ. Rien ne me manque  même pas le petit flacon de ……… pour me désaltérer.

Bien des choses à tes parents Je t’embrasse bien fort et embrasse bien Riri pour moi.  Peut être m’a-t-il déjà oublié.

Louis

 

***

 

 

 

2 Août 1914 5h30 du matin

Chère petite femme bien aimée

Ma compagnie est à Celles, je l’ai rejointe hier à 6h du soir dans l’automobile de Gauchenot.

Tout est calme, pas encore un seul coup de fusil.

Cette situation peut changer d’un moment à l’autre ; il n’est pas invraisemblable qu’il n’y aura plus grand-chose avant 3 ou 4 jours si cela arrive. Alors à la grâce de dieu.

Il faut avoir confiance en son étoile. L’heure est grave pour le pays il faut y mettre tout son cœur et oublier pour un instant ceux qui vous sont chers.

Maintenant nous apparaissons dans tout notre rôle. Au milieu d’une population en pleurs nous apparaissons toujours comme les sauveurs, on nous salue d’une façon particulière et nos hommes nous regardent amicalement ; ils sentent que leur vie comme  la nôtre est peut être  sur le point de finir ; Ils ont conscience de la fraternité militaire. Hier j’ai quitté notre foyer avec regret, ne pouvant retenir mes pleurs. J’ai laissé les clefs à Mme Maire lui confiant ainsi ce qui nous appartient. Hier je t’ai expédié 400 f je n’en ai pas besoin ayant tiré….. 500 x c’est grandement.

A toi du courage au milieu de tes malheurs et forme chance  aussi. Il te faut être forte  et courageuse ; à toi momentanément du moins sont confiés nos petites têtes chéries.

Embrasse bien fort tout le monde pour moi.

A bientôt j’espère pour la vie

Ton mari chéri.

louis

 

 

***

 

2 Aout 6h30 soir

Ma femme bienaimée

Rien de nouveau, nous sommes toujours à Celles dans une ignorance complète de toute chose ; nous ne voyons aucun journal et n’entendons parler de rien. Avec le qui-vive, nous faisons des travaux de défense autour de celles.

Nous sommes dans une période d’attente, d’inaction, d’incertitude très énervante.

Chacun aspire à une solution ; on commence à en avoir assez ; on se sent se transformer sous  l’action de la colère et de l’énervement.  Je ne sais si mes lettres t’arrivent, moi je suis très inquiet, je n’ai encore rien reçu depuis la dépêche de l’autre jour.

Je vis avec votre souvenir,  avec votre photographie que j’ai là sur le cœur.

Tout à vous tous, mes parents, tes parents, Riri,  toi, qui avez contribué à mon bonheur. Où est Léon ? Notre deuxième enfant se fait-il désireux de naitre.

Hélas, peut être à l’heure ou je t’écris tu traverses des heures pénibles et je ne suis pas auprès de toi.

Mme  Zuber est infirmière à Vittel (croix rouge). Mme Faucher est venue l’autre jour sonner chez nous, et  y a appris que tu devais avoir un bébé, elle était venue se mettre à ta disposition.

Mes plus tendres baisers à ma femme et à mon fils

Louis

 

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5 Août 11h du matin

 

Chère bien aimée,

Toujours rien. Des alertes produites par des renseignements archi faux qui abondent de tous les côtés. On ……. Pour gagner ses emplacements de tir et puis rien, on revient.

La 6°cie est chargée de la défense du front de Celles. Comme incident hier une douzaine de  cavaliers (hussards allemands) ont franchi la frontière. Le sous officier qui était en tête a été abattu par un ……  .

Il a été tué sur le coup et hier à l’hôtel nous pûmes consulter les petits fascicules de prières.

Les règlements que l’on a trouvés  sur lui.

C’est tout pour le moment

Chacun aspire à une solution. On en a assez. Cette attente est énervante. L’………….    ……..  …….  Les premiers jours ou on ne pouvait pas dormir ; Maintenant les nuits sont courtes car à 3 heures on est debout mais elles sont bien employées. D’ailleurs la fatigue y est pour quelque chose et puis à force d’envisager la guerre  on arrive à se faire à cette vie. On y va comme à la manœuvre, avec calme, Tant que les balles ne siffleront pas il en sera ainsi. Après ? On fera ce qu’on pourra .Advienne que pourra.

J’ai reçu ta bonne lettre hier soir elle  m’a fait grand plaisir. Hélas les nouvelles y sont bonnes mais déjà bien vieilles. Enfin il faut se contenter, il faut se résigner, elles font du bien tout de même.

Tout à vous tous

Ton Mari

Louis

 

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6 août 3h30 soir

 

Petite femme chérie

Toujours à Celles, même situation pour nous mais différente pour nos voisins. Hier une quinzaine de uhlans ont été descendus vers Cirey Blamont (là où nous étions en manœuvre il y a 15 jours) dont 5 ou 6 par une section de la 1° Cie (du 21BCP) Hier nous avons pu admirer quelques unes de leur dépouilles (lances et casques) Aujourd’hui il semble que leurs troupes se sont avancées devant le 20° et 17° bataillon mais elles n’ont pas l’air très mordantes. Nous, nous attendons toujours ces messieurs ; ils ne semblent pas désireux de s’engager dans les bois que nous sommes chargés de défendre.

Actuellement la concentration  n’est pas suffisamment armée et nous envisageons notre repli en arrière de la Meurthe si nous sommes attaqués par des forces supérieures. La 6° doit ultérieurement aller couper le bois de  ……. (promenade  à la neuveville).

Du reste nous ignorons presque tout ; Nous ne voyons aucun journal. Le train de Raon-Celles ne marchant plus depuis qq jours.

Je suis inquiet pour toi, je voudrais bien savoir. Hélas ! Le service postal aux armées est encore  incomplètement organisé ; personne ne reçoit de lettre. Ayons foi dans le destin  qui nous réuniras dans un foyer heureux dans qq mois et qui fera que l’Allemagne  en sortira battue et ruinée pour longtemps. Alors on pourra vivre complètement heureux n’ayant plus qua soigner , à dissiper nos petits ennuis quotidiens.

Embrasse bien riri pour moi

On ne met plus de timbres sur les lettres on met «  en campagne »

 

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Lettre du ?????

VIEROT, MEYER  et le capitaine SERENIS  sont très visiblement fatigués à ce qu’on dit car je ne les ai pas vu depuis 8 jours. Aujourd’hui dans la région on a du fusiller 6 à 7 espions dont un dentiste de St Dié.

A chaque moment on voit arriver du butin, chevaux casques  ……  Et prisonnier. On commence à s’y habituer. Vraisemblablement  et  jusqu’ à ce que la concentration soit achevée  des 2 côtés nous serons tranquilles. Nous  avons donc encore plusieurs beaux jours devant nous, car il ne faut l’oublier que toujours une campagne c’est pénible, éreintant et surtout ici où les nuits se font très fraiches.

J’ai acheté une ceinture de flanelle noire pour les reins en vue d’éviter les coliques, et un sac tyrolien pour porter le nécessaire, car les cantines sont toujours à la Neuveville en arrière de la Meurthe.

Vraiment ici on ne se doute pas que l’on est en guerre. A part quelques coups de canons  tirés par le fort de Manonvillers  on a rien entendu de la journée. Je crois qu’on pourra encore tranquillement cette nuit se mettre dans les toiles.

Allons à demain . Du courage, du courage et encore du courage.

Tout à vous tous

Louis

Les affaires du petit je n’y puis plus rien, cela n’arriverait pas et comment le faire savoir. Quant au plat achète en  un.

 

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7 août

 

Ma petite femme chérie

 

Maintenant depuis 2 jours la poste aux armées fonctionne militairement. Il  parait  que le service marchera assez bien. Il ne faut pas trop se plaindre. Je reçois à l’instant tes 2 lettres du samedi 1°août et du lundi 3 août.

Cela ne fait donc que 4 jours vu la distance et les difficultés ce n’est pas trop.

Elles me font bien plaisir tes lettres, mais elles sont un peu tristes, il faut réagir Il faut et toi en particulier tu dois être doublement courageuse.

La guerre que veux tu  est  une plaie de l’humanité, elle en est peut être aussi hélas une nécessité.

D’une façon générale nous sommes  bien partis, tout le monde se jette à nos cotés, l’issue apparait de plus en plus comme heureuse même si nous français nous sommes battus.

Faut attendre les Russes pour ruiner les approvisionnements et la finance allemande. Il nous faudra tenir jusqu’au bout. Il semble que logiquement la campagne sera certaine et terminée dans trois mois et très probablement avant.

Et je l’espère la leçon sera bonne et durable. Ici nous vivons très tranquillement pour l’instant. Des 2 côtés on se prépare mais on ne bouge pas ou très peu.

Le Bataillon a déjà descendu une dizaine de uhlans et de dragons sans perdre un homme. Les compagnies qui souffrent le plus sont :

la 1° cie

la section de Vierot

la 23°Cie

 

 

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Dimanche 8 août 1914

 

Petite chérie

Hier je voulais t’écrire lorsque subitement le commandant m’a envoyé en reconnaissance pour reconnaitre un chemin et remonter le moral à un groupe de …….. et de ……. Qui avaient abandonné leur poste à la frontière sous prétexte  qu’ils  avaient ……..de cavaliers et de l’infanterie derrière.

Je suis rentré à 8heure du soir n’ayant rencontre aucun de ces messieurs.

Toujours même situation. On entend toujours de temps en temps le canon de Manonvillers.

Nous sommes  mis sous le commandement du Général Du….. Commandant de l’armée de couverture. Cela prouve que la concentration est déjà assez avancée et d’ici peu les choses vont changer de f…..       .

Des troupes françaises sont déjà à Altkirch en Alsace. On croit être appelé à pousser sous peu une pointe en Alsace, jusqu’au Rhin et au-delà si possible. Ne t’étonne donc point si mes lettres viennent à se faire  beaucoup plus rares et surtout prennent un plus grand retard pour arriver. Voilà tout le nouveau que je connais. Nous sommes toujours très tranquilles presqu’autant qu’en manœuvre. On  mange bien mais  on  a  pas toujours un sommeil aussi paisible.

Bien des choses à tous et espérons que vous n’aurez pas le déplaisir de voir un seul allemand au cours de cette campagne. Je vois que la partie est bien engagée et ton papa peut se tranquilliser.

Tout à toi, Riri et au petit s’il est déjà

Louis

 

 

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Dimanche 8 août 1914

Petite femme chérie,

2°lettre aujourd’hui mais 2 mots seulement pour te donner l’adresse que tu dois mettre sur toutes tes lettres

En campagne – sans timbre

Lieutenant Fumey

Du 21°Bataillon de chasseurs à pied

6°compagnie

A Langres  Haute marne

On vient d’afficher une dépêche disant que nous sommes à Mulhouse. Sous peu nous pensons bien donner la main. Je viens de recevoir une lettre de toi, elle m’a fait bien plaisir. Elle est partie le 5 août et je la reçois le 8 à 3heure, ce n’est donc pas très long.

J’espère que de même tu reçois les miennes régulièrement.

J’ai été profondément  touché de la détermination que tu as prise pour le nom de notre petit. Quand tu sauras où est Léon et à quel corps il appartient tu me le feras savoir.

Je pense qu’il se pourrait bien qu’il soit au 8°corps et envoyé vers Mulhouse ; peut-être pourrons nous être voisin.

Mille caresses à toi et à Riri

Ton mari   Louis

 

***

 

Mercredi 12 août 1914

Chère petite femme chérie

Les heures sont parfois courtes. Depuis 2 jours je ne t’ai pas écrit. Nous étions détachés, 2 nuits sans sommeil pour moi et au contact de l’ennem1 seul dans le bois. Ma Cie a couvert en flanc une attaque du 20° bataillon sur Badonvillers. Nous avons assisté à 200 à 300 m d’un violent combat. Nous n’y avons pas participé parce que nous n’avons rien rencontré.

Maintenant nous sommes à Celles ou le bataillon attend toujours des ordres pour se porter sur l’Alsace avec des troupes massées à St Dié, Senones. Partout on prend l’offensive, partout on se bat sauf le 21° bataillon qui, dans la vallée ne voit rien . Partout on entend le canon,  partout les 2  partis sont aux prises et se livrent des combats acharnés  avec des alternatives de succès et de revers.

A l’heure où je t’écris les allemands  ont emporté un léger succès sur notre gauche. On songe à notre repli sur les ponts de la Meurthe.  Ma compagnie cependant très fatiguée repartira sans doute vers 4h sur le flanc de la vallée entre Celle et Raon l’étape.

Le 8° corps ou Léon sert sans doute  (à moins qu’il ne soit dans une formation de réserve) est vers bourmont. Une division celle de  ……… prend l’offensive vers la frontière.

Voilà les nouvelles, elles sont très changeantes. Donc ce soir une  3° nuit au bivouac se prépare et encore si l’on peut dormir cela va.

 Je pense bien à vous tous. L’action et la fatigue parfois estompent votre souvenir si vivant. Tendres baisers à notre ou nos petits, bonne santé et bonne chance.

 

***

 

 

jeudi 13 août 1914

Très chère petite femme

 

2 mots seulement. J’ai passé la nuit vers Neufmaison  6 km de Raon. 3° nuit de bivouac.

Comme tu vois on change de place, La Cie surtout. Aussi on est fatigué et on a besoin de sommeil. Ce mouvement en arrière a été provoqué par un échec du 20° bataillon de chasseurs vers Badonvillers.

Aujourd’hui déboule de Raon le 13° corps de Clermont Ferrand. Nous nous partons (7h matin) direction le Donon. Donc ce soir très probablement nous coucherons sur le territoire alsacien. Nous allons participer au mouvement d’invasion de la Haute alsace, et tâcher de donner la main aux troupes qui partant de Belfort sont au nord de Colmar.

Les bavarois que nous avons en face de nous se comportent en sauvage. Partout ils incendient les villages.

Toi sans doute tu es couchée et moi sans le savoir je suis une 2° fois papa.

Pourvu que tout se soit bien passé. Ma barbe pousse. Je commence à avoir l’air assez hirsute.

Tout à vous

Tout à toi et du courage

Ton mari

 Louis

 

***

 

Vendredi 14 août 1914

Très chère petite femme,

C’est du Donon que j’écris. Nous y sommes arrivés vers midi. Nous pensions y trouver une résistance sérieuse. Il n’en fut rien. Nous …….. le terrain étant difficile et fortement ruiné et …….

Toutes les troupes avaient été retirées pour être portées  sur Shirmeck où le canon tonne sans relâche depuis le matin.  Cela chauffe de ce côté en face des  bataillons de St Dié, sénones, le 21° de ligne et le 109 de Chaumont. Nous resterons peut être un jour ou 2 ici car nous sommes pivot d’une manœuvre d’armée ayant comme objectif la forteresse de Mutzig, Strasbourg et ultérieurement Saverne. Nous allons participer à l’action sur ces forteresses. Nous avons besoin de repos ; la compagnie étant éreintée et puis notre colonne  comporte les 17° et 20° bataillons de chasseurs ( Très éprouvés ces jours ci vers Pesmes et Blâmont) et le 17° d’infanterie ont grand besoin de se réorganiser, se reformer, se reposer.

2 blessés, je crois  pour le bataillon ce matin dans notre marche sur le Donon où une trentaine d’allemands nous attendaient. Après une longue marche sous bois baïonnette au canon, une section est tombée sur un champ de blé où nous avons trouvé 1 capitaine bavarois blessé  auprès duquel son ordonnance était restée. 1 autre blessé grièvement réserviste et père de 5 enfants. Je les ai respecté, les hommes auraient bien voulu les achever ; ils sont animés de l’esprit de vengeance et très remonté contre les bavarois, véritables brutes qui ont l’ordre d’achever nos blessés et qui brûlent nos villages et toutes les usines.

Enfin nous avons trouvé 5 …. Avec un sous officier qui se rendirent et auquel nous avons fait déposer les armes.

On a de la pitié et puis  après des coups de fusil partaient des maisons non encore fouillés et ……      le capitaine qui était à cheval.

De là une section est allée…… une route sous bois. Des cavaliers ennemis sont venus nous….. 1 sous officier a été tué 1 homme blessé.

 

***

 

 

Dimanche 16 Août 1914

 

  Petite femme chérie,

Nous sommes depuis avant-hier au Donon et probablement nous y resterons quelques jours. On s’y fortifie mais je ne crois pas qu’on y voit des troupes  ennemies.

Le temps est pluvieux et froid. Dans un instant et après deux nuits dans le foin nous allons partir au bivouac. Il n’y fera certes pas très bon.  Enfin c’est chacun son tour.

Le bataillon avec la brigade dont il fait partie  est à un pivot de manœuvre.

Ses fatigues  sont relativement faibles et ses pertes par le feu se montent à une dizaine d’hommes.

En partant  d’ici nous allons marcher (si notre offensive réussit) dans une région boisée et accidentée. Nous nous y  ravitaillerons difficilement mais je ne crois pas que nous y rencontrons beaucoup de monde.

C’est dans l’attaque des forteresses de Mutzig que nous aurons sans doute le premier coup de tampon sérieux. Mais vraisemblablement  n’aura  lieu que dans 8 ou 10 jours, peut être plus.

Voici un croquis très sommaire de ce qui se prépare ici.

 

 

 

En face de nous on a la connaissance de 3 corps d’armée ennemis, + des divisions de réserve, + des corps autrichiens qui arrivent sur le Rhin.

Voilà la situation. Quel sera le dénouement de ce côté, je ne sais ; Il semble que d’ici une quinzaine de jours une certitude sera intervenue.

Tes lettres mettent 5 jours pour arriver, les miennes ont l’air de mettre plus de temps. Je n’ai rien reçu hier, si je ne reçois rien aujourd’hui c’est sans doute que tu seras couchée et que nous ……. Notre 2° petit chéri. Embrasse les bien tous les deux pour moi.

Tout à toi

Ton Louis.

 

***

 

Samedi 26 août 1914

 

Ma chère amie,

Les journées sont tellement bien remplies que je n’ai plus le temps de t’écrire ; On passe sa vie dans les bois au milieu des obus et des balles.

Sur 270 hommes, il m’en reste 87.

Tous ces jours –ci on s’est battu autour de La Neuville. Bien des maisons de Raon  ont été brulées ; j’espère que nous pourrons en constater les dégâts  bientôt. On a reçu quelques renforts et on pense reprendre l’offensive.

Ici on est sans nouvelles, mais le bruit se confirme   qu’ils ont reçu une bonne pilée vers Nancy. Au bataillon il y a déjà bien des manquants.

Le capitaine TAUCHET, le capitaine CUNQ (1)  le lieutenant LAVOCAT (2) : tués

Le capitaine SAVONNEY , le capitaine SERENIS, le lieutenant MADON(balle au bras),  le lieutenant VICIOT, Le lieutenant LAURENT, des jeunes aussi  très grièvement blessés.

Sur  d’autres on ne sait rien (MEYER, CLEMENT) ainsi on se compte maintenant. Pour moi, la rumeur m’a dit tué par 2 fois, ce matin j’étais encore compté comme disparu. Il n’en n’est rien et toujours en entier. Le hasard en a voulu ainsi car par 6 fois déjà les balles n’ont pas voulu de moi. Je pense retourner au feu. Je ne verrai jamais pire que ce que j’ai vu. Quant à la fatigue, ces jours ci elle était extrême ; on était à bout de force, sans sommeil  et  peu de nourriture ;

La région est déserte plus d’habitants, pas plus à la ville qu’à la  campagne. Les Maires  sont  à Paris.

Aujourd’hui il semble que nous devions rester tranquilles. Nous sommes enfin en 2° ligne. Ce n’est pas trop tôt  car le bataillon a fait tout ce qu’il pouvait. On ne peut plus guère compter sur lui, moral affaibli fort des pertes et qq.  jours de retraite, peu de gradés. Tous les hommes de tous les régiments se groupent autour de l’officier qu’ils rencontrent ; tous se plaignent de ne plus en avoir.

Il nous faudrait 15 jours dans un camp pour nous reformer. Mais pour cela il faudrait quelqu'un pour nous remplacer.

 J’ai appris  que j’étais  mort pour la seconde fois par la rumeur publique ; je n’ai pas encore reçu de lettre ; j’ai cherché à me renseigner vers les Maires  mais ils étaient partis……………………………………………………………………et cette pauvre petite. Et puis comment cela s’est il passé ?

Avez-vous reçu des nouvelles de Léon. Bien des choses à mes parents et à tes parents.

Bons baisers à mes petits et à toi

Tout à toi Louis

Déjà 26 jours de campagne. Qu’ils ont semblé longs à tous. On croirait être parti depuis des mois

  1. CUNQ Jean Marie Eugène né le 22/02/1874 mort pour la France le 25/08/1914
  2. LAVOCAT  Louis  Eugène né le 04/09/1880 mort pour la France le 21/08/1914

 

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Citation à l'ordre du Bataillon

Citation bataillon

Citation à l'ordre de l'Armée

Citation arme e

Date de dernière mise à jour : 06/05/2017

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